Le jeu de la mort

par 295mem
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France 2 a diffusé le 17 mars 2010 à 20h 35 un faux jeu (zone Xtrême) mais avec de vrais candidats pour dénoncer la télé-réalité et ses dérives et ainsi démontrer le pouvoir d’asservissement de la télévision.

L’expérience de Milgram est transposée dans ce jeu.

Sept scientifiques encadrent ce projet, dont Jean-Léon Beauvois, professeur de psychologie sociale, Didier Courbet, chercheur en sciences de l’information et de la communication et Dominique Oberlé. Assistés par de jeunes doctorants, ils veillent à la validité scientifique du projet et au respect de l’expérience de Milgram.

Jean-Léon Beauvois explique qu’il ne pensait pas que la télévision était une autorité légitime, comme l’est la science dans l’expérience de Milgram, il pensait que la télé ne pouvait pas prescrire.

Dans ce jeu, le « scientifique en blouse blanche » est remplacé par une animatrice.

Le « public », absent de l’expérience originale, est présent.

Voir la deuxième partie de l’émission : « le temps de cerveau disponible »

Tania Young, animatrice de télévision, a remplacé la figure d’autorité qu’incarnait le scientifique en blouse blanche dans l’expérience originale. Tout comme lui à l’époque, ses injonctions à poursuivre étaient restreintes (« Ne vous laissez pas impressionner, il faut continuer », « vous devez continuer, c’est la règle » ou encore « la logique du jeu veut que vous continuiez »).

Si Milgram avait obtenu 62% de soumission (personne allant jusqu’au choc maximal), c’est plus de 80% que l’on retrouve pour cette adaptation moderne.

Tout comme dans l’expérience de Milgram, plusieurs variantes ont été réalisées :

  1. Les participants pensaient participer à un test qui ne passerait pas à la télévision
  2. Les participants pensaient participer à un test qui passerait à la télévision
  3. A 200 volts, une fausse assistante intervenait et contestait le principe du jeu en demandant d’arrêter. Elle se retirait après avoir été remise à sa place par l’animatrice.
  4. L’animatrice laissait le participant « seul » après que ce dernier ait administré le choc de 80 volts en lui précisant qu’il était le maître du jeu.

Contrairement à l’expérience originale, les variantes ont obtenu de forts taux de soumission puisque 70% des participants ont accepté de continuer à administrer les chocs jusqu’au terme de l’expérience. Seule la dernière variante a enregistré que seul 28% des gens sont allés jusqu’à 460 volts.

 À la fin de son ouvrage, Milgram écrivait :

« Je suis certain que l’obéissance et la désobéissance ont pour origine un aspect complexe de la personnalité, mais je sais que nous ne l’avons pas encore trouvé. »

En effet, ses résultats de l’époque s’expliquaient par la situation expérimentale.

L’expérience de 2010 a pu dégager des variables de la personnalité.

La grande majorité des participants ont été recontactés plus de 8 mois après leur passage à la fausse émission de téléréalité pour répondre à un « sondage d’opinion » organisé par l’université de Grenoble. Ce laps de temps permettait qu’ils ne fassent pas le lien entre les deux. Ce n’est qu’à la fin de l’enquête téléphonique qu’on leur faisait savoir et on leur demandait si les résultats de la présente enquête pouvaient être analysés pour faire lien avec leur précédente expérience télévisuelle.

L’échelle dite de personnalité utilisée a été empreintée à Costa et Mc Crae (souvent employée) et qui dégage un modèle en 5 facteurs:

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L’amabilité

Personne amicale, serviable, généreuse, confiante.
tendance à être compatissant et coopératif. Plus une personne est agréable, plus elle aura tendance à se soumettre aux attentes des autres et donc à l’autorité

Esprit consciencieux

Personne organisée, autodisciplinée, méticuleuse, orientée vers des buts. Plus cette dimension est importante, plus l’individu va se soumettre à l’autorité

L’ouverture

Personne ouverte aux expériences, imaginative, curieuse, créative et peu conventionnelle. Cette dimension n’a pas de lien avec la soumission à l’autorité

L’extraversion

Personne sociable, active, aimant le contact, tournée vers l’action et aimant attirer l’attention. Cette dimension n’a pas de lien avec la soumission à l’autorité

La stabilité émotionnelle

Personne ayant des dispositions aux émotions positives, calme, détendue.

C’est le contraire du névrotisme. Cette dimension n’a pas de lien avec la soumission à l’autorité

On voit donc que ce sont les deux premiers facteurs qui ont une influence sur la soumission à l’autorité.

Pour un tiers des sujets, ce sont leurs conjoints qui ont décrit leur partenaire, ce qui a permis aux auteurs de vérifier que la façon dont les sujets se perçoivent était cohérente avec la vision d’un proche.

On s’éloigne donc d’une position situationniste radicale bien que les traits de personnalités sont bien moins déterminants que la situation pour ce qui est de la soumission.

Dans cette étude, plus les sujets se caractérisaient par un niveau élevé d’esprit consciencieux, plus le niveau moyen des chocs électriques délivrés était élevé.

Les mêmes résultats étaient observés pour le niveau d’agréabilité, également appelé « soumission amicale ».

On sait que ces deux traits induisent moins d’agressivité, de prise de risques (sexuelles, liées aux drogues) et sont liés à l’ambition, à des compétences parentales élevées et à un niveau d’étude important. Ainsi, cela correspond davantage à des personnes bien intégrées socialement.

Ces « personnalités » ont beaucoup plus de difficultés à désobéir et l’on peut interpréter cela comme une indication sur ce que l’on peut attendre de quelqu’un dans un système social donné. Les gens les plus internes se retrouvent davantage dans les plus hautes classes sociales. L’internalité n’est pas sans rapport avec la soumission. Ici, plus les individus avaient un score élevé sur l’échelle d’internalité utilisée, plus les chocs électriques étaient violents.

Les auteurs ont également trouvé un lien entre le bien être subjectif et la soumission: Moins les sujets se déclaraient  « heureux », et plus ils se rebellaient.

Deux variables d’attitudes politiques ont également joué sur la soumission dans cette étude. Il semble que les femmes orientées politiquement à droite administrent des chocs électriques moyens plus élevés que les femmes orientées à gauche (422 volts contre 344 volts). Les résultats des hommes suivent cette tendance, mais les différences ne sont pas statistiquement significatives.

Un lien a été trouvé entre l’activisme politique et la rébellion. Les personnes ayant déjà où étant enclin à réaliser des actes de contestations politiques (signature de pétitions, boycott, manifestation, grève, occupation de bureau…) refusaient plus rapidement de poursuivre le jeu.

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